Agir mais pourquoi?
Les khettara alimentent les oasis en eau d'irrigation. La disparition des khettaras c’est la disparition de nombreuses exploitations, c'est la mort des oasis, sans lesquelles la vie dans cette région perd sa substance, c’est l'appauvrissement de tout un secteur géographique et économique, c’est l'exode pour ses habitants, c'est la disparition d'un écosystème original, d'une biodiversité très riche. Nous avons le devoir de préserver et de sauvegarder ce système ingénieux, écologique, qui respecte les cycles naturels, ce patrimoine ancestral universel qui ne doit pas disparaître.
Les Khettara du Tafilalet qui feraient en somme plus de 290 km de long avec un débit moyen de 6,5 litres par seconde, produisent plus que le barrage Hassan Addakhil, au nord d'Errachidia, sur le Ziz. En fait, en 2002 ce dernier a produit 25 millions de m³ alors que les khettara du Tafilalet produisaient 36Mm³. C'est dire à quel point ce potentiel naturel est important.
Ce besoin vital de sauvegarder les khettaras (Aboulkacem CHEBRI, archéologue, RISSANI)
Actuellement sur les 410 khettaras recensées dans le sud marocain (Tafilalet), plus de la moitié sont à sec.
La sécheresse n'est pas la seule responsable de la disparition progressive des khettaras. En fait, une khettara c’est un peu comme un enfant dont il faut sans cesse s'occuper pour qu'il grandisse dans de bonnes conditions. Son entretien est un travail de longue haleine, qui exige une multitude d'opérations telles que le nettoyage et le curage du sable, la correction des pentes et le reprofilage, la construction des puisards, le prolongement du puits de tête, etc Sa restauration est difficile et pose des problèmes qui peuvent parfois s'apparenter à la restauration de monuments historiques.
Actuellement l'entretien des khettara, pourtant vital, est menacé par le manque de main-d’œuvre lié à l'exode rural, par le manque de moyens financiers lié au manque de revenus qu'engendre la baisse du niveau des nappes, lequel conduit encore à de nouveaux départs vers les villes.
Il faut briser ce cycle infernal qui menace de paupérisation et de disparition des sociétés qui se sont construites au cours des millénaires autour des khettara.
La khettara assure systématiquement le respect et la préservation des conditions écologiques et naturelles.
En effet, aussi bien la localisation, la technique, le système de gestion, que les matériaux utilisés et les objectifs assignés à ce patrimoine se retrouvent tous pour sauvegarder les ressources naturelles, notamment le complexe Eau-Sol, tout en assurant un développement durable des communautés qui en dépendent. Par ailleurs, les indicateurs écologiques et d'évaluation environnementale décèlent une nette synergie et adaptation des khettara à leur environnement, ainsi que leur parfaite intégration avec les critères et les lignes fondant un écosystème durable.
Le milieu général des khettara regroupe deux environnements d'une importance capitale à savoir : L'environnement social et l’environnement naturel.
L'environnement social renferme tous les aspects liés aux coutumes, conditions démographiques, patrimoine historique et conditions hygiéniques et biologiques. En fait, le système des khettara se caractérise par un volet organisationnel et institutionnel de gestion et d'entretien basé sur une approche ancestrale faisant intervenir tous les ayants droits d'eau équivalant à l’approche dite "participative" récemment développée. Par ailleurs, la gestion du contexte social est en parfaite harmonie avec le développement démographique tout en gardant l’authenticité des activités réalisées.
S'agissant de l'environnement naturel, normalement utilisée, la khettara assure la protection des ressources naturelles eau et sol. D'une part, l'eau captée par des drains naturels percés par l'ingéniosité de l'homme "d’autrefois", est exploitée de manière rationnelle, évitant les risques d’une utilisation abusive et dangereuse des ressources. Par ailleurs, le contexte climatique des zones arides est caractérisé par un gradient thermique élevé et des vents ensablés, facteurs d’amplification des phénomènes de désertification et d’érosion. Face à la dégradation prononcée du couvert végétal, les khettara, par leur existence, atténuent les effets de désertification et d’avancée de sable à travers le développement des oasis et la sauvegarde du patrimoine phoenicole. (M. Saada)
L'eau virtuelle
L'eau virtuelle c'est l'eau qui est nécessaire à la production de biens, industriels comme agricoles, et de services, et est contenue dans ces biens ou services. La production d’un kilo de viande par exemple requiert 16000 litres d'eau, soit environ dix fois plus d'eau que la production d'un kilo de blé. Lorsqu'un pays importe des marchandises, il importe aussi, virtuellement, l'eau qui a servi à les fabriquer. Lorsque nous mangeons une orange marocaine, nous consommons l'eau du Maroc. Le commerce en eau virtuelle crée des économies d'eau pour les pays importateurs. Au niveau mondial, les économies d'eau résultant du transfert d'eau virtuelle par le commerce des produits alimentaires représenteraient 385 milliards de m³ par an. Une raison supplémentaire pour agir.